Ne viennent chez Asturias que ceux qui savent. Bienvenue parmi les sachants, ces personnes au courant que derrière la gare du midi, au fond d’un café à bingo, se cache un restaurant espagnol dont on se refile le nom discrètement depuis déjà quelques générations.
Le café est ouvert depuis 1958, mais c’est 20 ans plus tard qu’Aurora (la matriarche) le reprend et commence à proposer des tapas pour éponger la Jupiler au fût. Puis des plats, simples, bon marché, roboratifs. Et espagnols, comme elle. Le lieu est fréquenté par tout ce que la ville compte comme immigrés ibériques mais sa réputation s’étend assez vite. Elle cuisine bien, Aurora. Et ça fait 41 ans déjà.
Ce qui n’a pas changé non plus, ou si peu, c’est la déco. Napperons publicitaires en papier, match de foot à la télé et bar qui soutient quelques habitués.
Ce midi là, j’avais oublié de réserver. Pourtant je le sais que c’est toujours plein. L’endroit est entre autres la cantine du personnel Thalys et Eurostar. Mais j’avais trop envie de l’agneau, je l’aurais mangé debout à côté du bingo. Alors nous nous sommes assis en terrasse, table en plastique et chantier des plus bruxellois comme vue imprenable. Et c’était super, comme d’habitude. En plus de se refiler l’adresse sous le manteau, les sachants se fendent généralement de bons conseils sur les plats incontournables. Moi c’est toujours pareil : le calamar et l’agneau.
« On prend une entrée ? » me demande benoitement mon voisin de table. Malheureux, tu ne connais pas la taille des portions ! Je réserve les entrées aux grandes tables, celles où on ne commandera pas un plat par personne parce qu’ils sont pantagruéliques. Mon voisin loupe donc les croquettes au jambon ibérique, les albondigas, les patatas bravas (et pas des moindres), le chorizo cuit au cidre et les artichauts vinaigrés (entre 4 et 7€). Par contre il sait désormais que la tortilla est délicieuse, on en reçoit un morceau pour nous faire patienter.
Puis arrive le calamar a la plancha (14,5€), grillé avec un vrai goût de grillé, de l’huile d’olive, de l’ail, du persil. Jamais élastique, toujours parfait. Et l’agneau (18,7€). Aaaaaaah, l’agneau. Un morceau gros comme mon chat, longuement cuit au four, on pourrait le manger à la petite cuillère. Avec ça, une bassine de frites, de la mayo maison. Pas de salade, mais on aurait pu en demander. Et une Jupiler au fût.
Je ne sais même pas où on a trouvé la place pour la crème catalane (7€).
Si vous y allez, demandez le cidre maison, tout naturel, à peine pétillant et dont la légère acidité est bienvenue dans cet océan de (bon) gras.
On paie moins de 30€ par personne. Comme d’habitude.
Voilà, maintenant vous savez.